Société d’ Histoire de Revel Saint-Ferréol                                    LES CAHIERS DE L’ HISTOIRE

 

 

NOUVELLES SCULPTURES ROMANES

DE SOREZE Tarn

 

 D’après Nelly POUSTHOMIS-DALLE in « ARCHEOLOGIE MEDIEVALE
n°4 – 1986 pages 21 – 47.
 

 

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Suite à un précédent article consacré à une série de chapiteaux de type corinthien altéré, nous publions ici une analyse de neuf autres chapiteaux, de pièces significatives sélectionnées dans un ensemble de frises, tailloirs, claveaux et modillons provenant de Soréze. Cette étude est suivie d'une synthèse sur la sculpture produite pour Soréze, de la fin du XIe siècle au début du XIIIe, mais surtout au XIIe siècle.

 Caractérisée par un répertoire ornemental et iconographique traditionnel, elle montre une prédilection pour le décor végétal et animal laissant une faible part à la représentation humaine.

 La situation de carrefour géographique de Soréze explique sans doute que sa production artistique soit traversée de multiples courants véhiculant des modèles comme le décor de rinceaux et fleurons, les sirènes, les dragons, etc..., qu'elle montre des influences extérieures diverses mais toujours très diffuses. L'hétérogénéité et l'échelonnement dans le temps des œuvres qui nous sont parvenues ne permettent guère de définir un style Soréziens.

 De qualité moyenne, ces sculptures se caractérisent par la symétrie de leurs compositions, par la vigueur des reliefs et du travail laissant souvent visibles les traces d'outils, enfin par une grande sûreté d'exécution. On peut donc attribuer cette production sculptée à un ou plusieurs de ces ateliers locaux qui ont fleuri à l'époque romane en Albigeois et qui s'attardent dans un « art roman décadent».

 

 

Lors d'un précédent article, nous avions étudié une série de chapiteaux de type corinthien altéré provenant de Soréze (1). Nous nous proposons ici de compléter cette première étude par l'analyse d'un autre groupe de chapiteaux, d'un ensemble de frises, tailloirs et claveaux et d'une série de modillons, provenant eux aussi de Soréze ou de ses environs.

 

I. LES CHAPITEAUX

 

Si la dizaine de chapiteaux qui avaient fait l'objet de notre précédent article présentaient des caractères communs justifiant qu'une étude particulière leur soit consacrée, il n'en va pas de même pour les neuf autres chapiteaux, hétérogènes par leur style, leur iconographie et leur datation.

Seul trait commun, et à la différence de la série corinthienne, tous sont d'assez petites dimensions, variant de 0,23 à 0,47 m de hauteur, de 0,20 à 0,25, voire 0,37 m de largeur sous tailloir, leur astragale admettant des colonnes de 0,11 à 0,15 m de diamètre en moyenne et jusqu'à 0,27 m. Par leurs proportions, ils peuvent être

répartis en deux groupes : l'un caractérisé par une corbeille assez haute (0,30 à 0,47 m) et étroite, angulaire dans trois cas, l'autre par une corbeille plus équilibrée (0,23 à 0,26 x 0,20 à 0,26 m). Nous disposons d'un chapiteau libre, d'un chapiteau adossé et de trois angulaires, les quatre derniers restant indéterminés du fait de leur remploi actuel.

Hétérogène, cet ensemble de chapiteaux ne permet guère qu'une classification arbitraire. Nous proposons de reconnaître deux séries : l'une feuillagée comprenant trois éléments, l'autre figurée en comptant six. Ceci n'exclut pas une certaine variété à l'intérieur de chaque groupe.

 

 

 

1. Les chapiteaux feuillagés

 

Les trois œuvres de ce groupe sont très différentes les unes des autres par leur épannelage et par l'esprit de leur décor. Même si le vocabulaire ornemental est le même, pour deux d'entre eux (rinceaux et fleurons) le traitement en est radicalement différent, comme nous allons le constater.

 

La corbeille du premier chapiteau (n° 11) (2) est angulaire, tronconique, couverte d'un réseau de rinceaux et fleurons, sortis de la gueule d'une tête animale ou monstrueuse placée à l'angle. Le décor des deux faces est symétrique : les rinceaux se divisent, s'achèvent en fleurons qu'ils enferment dans leurs courbes ou s'entrelacent au centre de la corbeille. La sculpture est méplate.

L'héritage corinthien ne se manifeste que par la présence de dés reliés à l'angle par des rinceaux rappelant les hampes d'une volute que remplace ici la tête animale. Ce décor couvrant, compliqué et à prime abord désordonné, rappelle assez un type de chapiteau largement répandu au XIe siècle et même plus tardivement dans le Centre et le Midi de la France (3).

 

 

 

 

Tout autre est le chapiteau n° 12 pourtant orné du même thème végétal. Son épannelage en tronc de pyramide renversé aux angles arrondis a déterminé l'ordonnance de l'ornementation qui en épouse et en souligne les divisions en opposant les faces aux angles. En effet, sur la partie actuellement visible de ce chapiteau réemployé dans une façade, la ligne brisée du rinceau délimite des triangles à l'intérieur desquels se logent deux fleurons.

 

 La composition très géométrique se réduit donc à l'alternance de pseudo-palmettes intercalées tête-bêche, au dessin très régulier. Le relief est semi-méplat en réserve.

Le bord supérieur de la corbeille est rectiligne. Le principe de division de la corbeille opposant les faces aux angles n'est pas exceptionnel, il est une des solutions adoptées pour assurer le passage du cylindre de la colonne au parallélépipède du tailloir.

 

 Si dans pareil cas la corbeille est plutôt ornée de motifs géométriques comme dans la crypte de Leyre en Navarre, au chevet de Saint-Martin de Londres (Hérault), à Consac en Saintonge, elle peut être décorée de rinceaux et fleurons opposés ou adossés (4).

 

Deux chapiteaux, deux conceptions radicalement différentes d'un même motif végétal : dans un cas le rinceau feuillagé dessine un décor couvrant mais conserve sa souplesse et son naturel ; dans l'autre, assujetti à son support, il perd toute vie et toute signification végétale pour n'être plus qu'un décor presque abstrait et d'une assez grande sécheresse.

 

Avec le troisième chapiteau (n° 13) le décor change en même temps que le style. A l'élégance de la corbeille s'ajoute celle des feuillages qui l'ornent sur les trois-quarts de sa hauteur, des rameaux aux longues feuilles opposées et nervurées que font ployer des fruits communs aux extrémités de deux feuillages voisins (5).

 

Le quart supérieur de la corbeille reprend l'épannelage corinthien avec des dés reliés à la volute d'angle (une boule?) par des hampes nervurées que de larges évidements dégagent du fond en même temps que le sommet des feuillages. Le relief méplat des feuilles taillées en biseau est rehaussé par le volume des boules qui figurent les fruits. On ne peut cependant parler ici de chapiteaux à feuilles d'eau et crochets tels que ceux largement répandus à partir de l'art cistercien.

 

2. Les chapiteaux figurés et historié

 

Chapiteaux aux serpents, lions et oiseaux

 

Nous débuterons cette série par deux chapiteaux très semblables par leur thème et leur composition. Probablement angulaires (6), ils ont une corbeille haute et étroite où s'étagent, au-dessus d'un astragale torsadé, deux lions dévorant ou piétinant un serpent à queue bifide (ou deux serpents), deux oiseaux affrontés au-dessus desquels apparaît un épannelage hérité du corinthien avec abaque échancré, volutes d'angle et dés médians.

 

 

 

 

La composition du chapiteau n° 14 est plus savante et l'exécution en est plus sûre. Les volumes sont vigoureux et mis en valeur par des évidements et des refouillements. En comparaison, le chapiteau n° 15 semble une imitation trahissant une incompréhension ou une interprétation du thème qui aboutit à une composition moins heureuse, associée à un traitement plus plat des volumes.

 

Il n'est pas rare de rencontrer des oiseaux ou des lions affrontés ou accolés sur les corbeilles de chapiteaux romans, non plus que la superposition de deux ou trois rangées d'animaux. Ce thème, avec des variantes, semble appartenir à un vaste courant allant de l'Ouest de la France à la vallée du Rhin et englobant le Nord de l'Espagne et de l'Italie

. A Loarre et à Jaca (7), des quadrupèdes affrontés sont surmontés d'oiseaux, de même que sur un chapiteau de l'atrium de Saint-Ambroise de Milan ou sur un chapiteau de la nef de Saint-Sigismond de-Rivolta d'Adda (8) ou à Pavie où l'on dispose d'un des plus anciens exemples de ce thème (9). A Fromista ce sont deux rangées de lions qui se superposent (10).

Plusieurs œuvres conservées dans les collections publiques comme le Louvre (11) ou le Musée d'Aquitaine à Bordeaux (12) présentent ce thème d'oiseaux attaquant des lions.

 Ainsi, sur trois chapiteaux provenant de Sainte-Croix-du-Mont (Gironde), et conservés au château de Castelnau-Bretenoux (Lot) (13), deux rangées de quadrupèdes tête-bêche s'entredévorent, ceux du haut luttant aussi contre des oiseaux. M. Léon Pressouyre rapproche ces trois œuvres d'un chapiteau de l'église supérieure de Saint-Eutrope de Saintes en rappelant combien ce thème est fréquent en Saintonge (14).

Simple coïncidence peut-être mais difficile à passer sous silence, M. l'abbé Jean Cabanot propose de rapprocher certains chapiteaux intérieurs de l'abbatiale de Burlats -aux portes de Castres et donc assez proche de Soréze - d'œuvres des pays de l'Ouest et notamment du clocher de Saint-Eutrope de Saintes (15), M.Marcel Durliat voit également une influence de l'Ouest français dans la composition adoptée pour les deux portails de cette même abbatiale (16)

 

Citons encore un chapiteau conservé au Musée d'art de Cleveland, originaire de l'Ouest de la France et qui, plus précisément, proviendrait de la chapelle des templiers de Lesparre en Gironde, chapiteau dont la corbeille associe des oiseaux dont un surmonte un quadrupède (17).

 

Selon certains auteurs, ce motif serait d'origine orientale. M. Marcel Durliat pense que l'origine de ce thème pourrait être recherchée dans un passage de l'Apocalypse dont une des illustrations les plus fidèles serait un chapiteau de la cathédrale de Spire où des enfants jouent avec des lions et des serpents. Les quelques exemples que nous venons de citer prouvent la large diffusion de ce thème et de ses variantes.

 

Chapiteau aux dragons

 

Un autre chapiteau angulaire (n° 16) rappelle les deux précédents par ses proportions, encore qu'ici l'étroitesse de la corbeille soit plus accentuée et que ses dimensions soient inférieures à celles des deux précédents. Deux dragons, mi-serpents mi-oiseaux selon le mode de représentation conventionnel que l'on retrouve en particulier à Saint-Sernin de Toulouse, à Moissac et à Saint-Michel de Lescure (Tarn), ornent symétriquement chaque face pour se rejoindre à l'angle, sous la volute, en une tête commune. Ils sont assez décoratifs tant par leurs enroulements que par les cannelures, imbrications et nid d'abeille qui recouvrent leurs corps cependant un peu grêles.

 

Le matériau tendre -un grès - et l'agencement en spirales de leurs queues a permis un jeu de pleins et de vides, d'ombre et de lumière, par des évidements et des refouillements. L'héritage corinthien est encore sensible au registre supérieur et selon un procédé voisin de celui du chapiteau n° 15, des hampes nervurées naissent derrière les ailes des dragons, dont les extrémités recouvrent les dés et viennent s'enrouler en volutes à l'angle.

 

 

 

 

Chapiteau aux sirènes

 

Nous rattacherons enfin aux œuvres précédentes un chapiteau aux sirènes (n° 17) malgré des dimensions et des proportions sensiblement différentes. Les sirènes poissons, placées la tête à l'angle, tiennent leur queue bifide redressée de part et d'autre et dont les nageoires viennent former le dé médian et les volutes, détail qui évoque la façon, déjà notée, de lier le décor au registre supérieur de la corbeille.

 La représentation de ces sirènes est traditionnelle et rappelle notamment un chapiteau du cloître d'Elne (Pyrénées-Orientales). Ce thème très fréquent dans le centre de la France a connu aussi une très grande faveur en Albigeois (18). Le mauvais état de ce chapiteau ne permet guère de commentaire stylistique ; l'étroitesse du buste par rapport à l'épaisseur des queues ainsi que la grossièreté des mains trop grandes et dont la position est inversée pourraient seules témoigner d'une certaine maladresse ou d'une certaine lourdeur.

On relève quelques traces de polychromie, bleu sur le fond de la corbeille, rouge sur les cheveux des sirènes.

 

 

 

Chapiteau d'Adam et Eve

 

Le chapiteau n° 18 est unique dans la série connue de Soréze à bien des titres. Tout d'abord l'épannelage est tronconique avec un astragale saillant et un abaque rectiligne et lisse. Il a été sculpté sur trois faces, avec délicatesse et précision dans un calcaire à grain fin.

 C'est aussi le seul exemple d'un thème biblique : il représente le péché originel avec Adam et Eve placés à chaque angle et séparés par l'arbre de la connaissance autour duquel s'enroule le serpent tentateur. Leurs corps, à peine différenciés, sont trapus et se ploient sous l'angle de l'abaque.

 

Leurs visages sont assez caractéristiques, notamment avec leurs yeux obliques, les gestes sont expressifs malgré des disproportions ou des schématisations dans l'anatomie. Le serpent, représenté de façon traditionnelle, est du même type que ceux qui ornent des modillons ou des chapiteaux soréziens. Quant à la végétation, luxuriante et ondoyante avec ses longues feuilles souples taillées en biseau, elle donne l'impression d'une certaine mollesse dans le style

. Nous avons déjà rencontré sur le chapiteau n° 13 cet agencement en « as de cœur » de longues feuilles souples nervurées qui se rejoignent et se recourbent sous le poids d'un fruit commun. Une telle parenté de motif entre deux œuvres de Soréze, même très éloignées par le style et dans le temps, mérite d'être soulignée.

 

Le thème de la Tentation est courant et sa représentation ne présente guère ici d'originalité. Stylistiquement, la morphologie des personnages évoque assez des œuvres catalanes. L'assez grande sûreté d'exécution, en même temps qu'une certaine mollesse et un abaque rectiligne, pourraient indiquer une date plutôt tardive telle que le dernier quart du XII° siècle.

 

 

 

 

Chapiteau aux lions

 

Nous terminons cette série avec une œuvre (chapiteau n° 19) elle aussi unique à Soréze par son style et par sa date. Sa corbeille, peu élevée et très évasée est sculptée sur quatre faces et surmontée d'un faux tailloir qui en est solidaire. Sur un fond orné de feuilles plates stylisées se dégagent des lions qui passent, d'autres félins vus de face et des masques, têtes léonines grimaçantes. Leur représentation est stéréotypée.

Les têtes et les poitrails situés aux angles, sous une volute, sont détachés du fond par un évidement. Le faux tailloir est décoré d'une frise de fleurons insérés dans un rinceau ondulé.

 

Ces différents caractères rattachent ce chapiteau aux productions de « l'art roman décadent du Sud-ouest » tel que l'a défini Paul Mesplé (19). Mme Marguerite Vidal rapproche des chapiteaux moissagais très voisins du nôtre par leurs proportions et leur structure, leur iconographie et leur style, des cloîtres catalans et les date du XIIIe siècle (20).

On pourrait multiplier les exemples d'œuvres similaires, largement répandues dans le Sud-ouest de la France, notamment dans le Toulousain, l'Agenais et le pays de Foix et généralement datés de la fin du XII° et du XIII° siècles.

 

Les collections américaines abritent un certain nombre d'œuvres de ce type (21) hélas privées de leur contexte architectural et dont l'origine précise reste le plus souvent inconnue. Elles confirment cependant l'expansion dans le Sud-ouest de la France de cet art roman « décadent » au travers d'un très grand nombre d'œuvres produites en série et largement diffusées dans les chantiers de l'extrême fin du XIIe et du XIIIe siècles.

 

 

 

 

L'ensemble de ces chapiteaux, même s'ils ne constituent pas une série homogène, se distinguent à tous égards de la série corinthienne étudiée précédemment.

En effet, par leurs formes et leurs dimensions, ils peuvent être attribués à un ou deux portails dont un plus petit - ou à un portail et une fenêtre - (22) et à un cloître (23).

Est-il possible avec si peu d'éléments d'évoquer la question, sinon d'un programme iconographique, du moins d'une ligne directrice dans le choix des thèmes décoratifs retenus ? La plus grande prudence s'impose eu égard au petit nombre d'œuvres qui nous sont parvenues et à leur échelonnement dans le temps. Cependant des thèmes comme les combats d'oiseaux, de lions et de serpents, les dragons ailés, les sirènes, et plus encore le

chapiteau d'Adam et Eve, évoquent une insistance sur les notions de tentation et de péché.

 

D'un point de vue stylistique, peut-être est-il possible de reconnaître à travers plusieurs œuvres sinon un atelier du moins une « recette » qui consisterait à utiliser un élément de décor (une aile, une nageoire, un rinceau) pour servir de lien avec le registre supérieur en participant à sa composition (en servant de hampe et de volute, en décorant un dé).

 

Les influences extérieures semblent diverses et assez floues mais témoignent d'une ouverture, de la connaissance d'œuvres plus « savantes ». En effet, plus que dans la série corinthienne, on sent combien la situation de Soréze dans une zone de carrefour, dans un couloir de circulation, a pu la mettre en relation avec de grands chantiers, l'intégrer à de vastes courants artistiques véhiculant des thèmes décoratifs ou iconographiques, et même, avec le chapiteau aux lions, en faire un jalon supplémentaire dans la vaste production que l'on peut qualifier de masse qu'est « l'art roman décadent du Sud-ouest ».

 

Quant aux datations, qui restent forcément imprécises en l'absence de contexte architectural, elles s'échelonnent du XIe au XIII° siècle suivant l'ordre que nous avons choisi pour l'analyse de ce deuxième ensemble de chapiteaux.

 

II. LES FRISES, TAILLOIRS, IMPOSTES ET CLAVEAUX

 

Nous traiterons en même temps de ces pièces bien qu'elles soient différentes par leur destination, car elles possèdent deux caractères communs liés: celui d'offrir une surface longue et étroite propice à l'exécution d'un décor en frise et celui de présenter le même répertoire décoratif (24). Nous avons répertorié 24 frises, 8 tailloirs ou impostes (25) et 11 claveaux dont c'est la courbure plus ou moins prononcée qui a défini l'appellation.

 

Les dimensions

 

  FRISES TAILLOIRS
Ep. totale* - moyennes 15-16 cm  
* - extrêmes 11-17.5 cm 12-17 cm
H. bandeau* - moyennes  6- 7 cm   5- 6 cm
* - extrêmes  3- 7.5 cm   4- 7 cm
H. chanfrein* - moyennes 11-12 cm 10-12 cm
* - extrêmes  9.5-13.5 cm 10-15 cm

 

  

 Ce tableau montre une assez grande homogénéité dans les dimensions.

Les décors

Le décor exécuté sur ces trois types de pierres est donc constitué par la répétition d'un motif ou de deux en alternance : fleurons, fleurs de lys (fleurons trilobés),palmettes, fleurs, le rinceau ou la tige plate servent de lien entre les motifs reproduits. Plus rares sont les décors de pommes de pin, de billettes ou de têtes d'anges.

 

  

 

 

 

Motifs décoratifs

Frises

Tailloirs

Impostes

Claveaux

Total

Rinceau et fleurons

10

3

5

18

Rinceaux et palmettes

Rinceaux, palmettes et fleurons

1

 

 

1

Rinceaux, fleurs et fleurons

2

 

1

3

Palmettes inscrites

4

 

 

4

Fleurs de lys inscrites

2

2

 

4

Pommes de pin

2

 

 

2

Billettes

1

 

 

1

Têtes d'anges

1

 

3

4

Moulures

 

 

1

1

Sans décor

1

 

1

2

 

 

 

  Il semble donc que l'on ait préféré

- les fleurons contournés par un rinceau pour les frises (26) et les claveaux ;

- les palmettes associées aux rinceaux pour les tailloirs (27) >

- les motifs inscrits (palmettes et fleurs de lys) pour les frises (28).

 

Ces remarques, données seulement à titre indicatif, montrent cependant une nette préférence pour le décor floral.

De même que des motifs identiques peuvent orner des pierres de destinations diverses, de même leurs styles se retrouvent-ils indifféremment d'une catégorie à l'autre. C'est surtout vrai pour les motifs les plus couramment représentés : fleurons dans un rinceau, motifs inscrits. Si ces décors végétaux sont généralement exécutés en relief méplat ou semi-méplat en réserve ou à fond de cuvette avec utilisation de ciseaux (29), il est possible de distinguer en gros trois factures différentes et donc de répartir ces pièces en trois séries stylistiques (Pl. I).

 

Dans la première, le rinceau dessine des méandres assez lâches et étirés que les fleurons remplissent mal.

Leurs lobes sont taillés en biseau, une large nervure médiane réservée sur certains donne l'impression que ces lobes sont dédoublés. Rinceaux et fleurons sont grêles et un peu secs. Le relief méplat est réservé. Ce style qui s'apparente à celui du linteau de Saint-Génis-des­Fontaines se retrouve surtout sur trois claveaux (n° 1) et sur une frise (n° 2).

 

Dans une deuxième série, le rinceau dessine des méandres serrés, voire étriqués, quelquefois presque anguleux. Les fleurons aux lobes charnus couvrent tout l'espace laissé par le rinceau et paraissent à l'étroit dans ses sinuosités. Le relief est semi-méplat à fond de cuvette quelquefois proche de la réserve. Ce style « gras » (30) caractérise surtout des frises dont un des meilleurs exemples est la frise n° 3 qui voisine avec une facture plus plate et plus sèche mais dont les caractéristiques du dessin restent les mêmes.

 

Le dernier groupe est d'un style intermédiaire, caractérisé par la régularité d'une composition harmonieuse, la fermeté et la précision de l'exécution. Il est vrai que la plupart des éléments de cette série présente une fraîcheur d'exécution exceptionnelle qui les avantage sans aucun doute. Ainsi le n° 9 où les arêtes laissées par la taille en biseau des fleurons et du rinceau sont restées vives.

 

 Le relief est semi-méplat à fond de cuvette surtout sensible sous le fleuron qui se déploie sur une sorte de conque délimitée par un méandre du rinceau. Il en est de même pour certaines palmettes enfermées dans leur tige plate. Il est à noter que ce style est surtout représenté par des éléments remployés dans le clocher Saint-Martin de Soréze. Il est possible d'y rattacher le tailloir n° 4 bien que plus mou, le n° 2 ainsi que le n° 8 malgré un décor différent.

 

 

 

Claveau n° 1

                                            

 

 

 

 

 

 

Frise n° 3

 

 

 

 

 

 

 

 

  

Frise n° 9

  

 

 

 

 


 

 

Les frises de motifs inscrits se distinguent par leur composition : un fleuron trifolié (« fleur de lys ») ou la palmette sont répétés à intervalle régulier. Ils sont enfermés dans leur tige issue d'une bague qui les resserre à la base. Cette tige est soit plate soit partagée en deux par une taille en biseau.

 Dans tous les cas sa largeur contraste avec le motif central proportionnellement réduit. Dans les écoinçons entre les cercles dessinés par les tiges se logent des feuilles simples de part et d'autre de la bague qui les attache aux tiges enfermant deux motifs juxtaposés. On trouve de chaque côté de cette bague soit une seule feuille, soit deux, soit trois.

 

 Elles peuvent être rapprochées des lobes des fleurons « classiques ». En effet, lorsque ceux-ci s'intercalent dans les sinuosités d'un rinceau, un de leurs lobes, très court, se trouve à la perpendiculaire de la bague qui le lie au rinceau (il s'agit d'ailleurs d'un motif relativement courant).

 

De même, dans des frises de rinceaux entrelacés et de palmettes ou de fleurs, ces feuilles simples se retrouvent, mais généralement orientées dans le sens de la frise ; elles sont uniques, doubles ou triples, ce qui prouve leur parenté avec les fleurons.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  A côté d'œuvres de qualité voisinent des imitations plus ou moins maladroites, mais, dans l'ensemble, l'exécution de ces décors répétitifs est assez sûre, ils s'intègrent bien à leur cadre et le passage des angles entre deux faces se fait sans aucune maladresse (cf. tailloir n° 4).

 

Deux fragments de tailloirs, ornés d'une frise de rinceau et fleurons sur le chanfrein, portent une inscription latine sur le bandeau, à l'intérieur d'un cadre (tailloirs n° 2 et 3). Ces deux éléments semblent aller de paire si l'on en juge par la similitude du décor des chanfreins et des inscriptions. Toutefois ils présentent des dimensions sensiblement différentes notamment au niveau du chanfrein.

De plus, la frise ne se poursuit pas d'un fragment à l'autre, il manque un méandre convexe du rinceau avec un fleuron inversé entre les deux éléments. Sur le fragment n° 2, la frise et l'inscription débutent sur la face latérale gauche, mais celle-ci est brisée, et sepoursuivent sur la face principale sans que le cadre se referme à son extrémité droite.

 

Sur le fragment n° 3, la frise est interrompue arbitrairement à chaque extrémité mais l'inscription semble commencer à gauche puisque le cadre est fermé, tandis qu'à droite, la limite du cadre est incertaine par suite de la cassure et de la restauration de l'angle inférieur du bandeau. La frise rappelle un modèle souvent rencontré à Soréze et décrit précédemment, avec une facture proche du style 3. Quant à l'inscription, la graphie des lettres est la même sur les deux fragments. Alors que certaines lettres ont seulement été gravées, d'autres sont déjà sculptées en réserve et ornées. La forme de chaque lettre est alors donnée par un double, voire un triple contour en relief qui s'achève en fleurons ou palmettes dans les vides des lettres. Sur la partie achevée, l'abaissement du fond laisse en relief méplat la bordure, délimitée au préalable par un trait gravé, les contours et ornements des lettres. Sur le premier fragment les huit premières lettres du grand côté sont ornées alors que sur le second le décor n'est esquissé que sur trois lettres non consécutives.

 

Nous proposons une lecture un peu différente de celle donnée par F. Lacroix en 1913 et reprise par les

auteurs du Corpus des inscriptions de la France médiévale (31) :

Premier fragment (tailloir n° 2) :

- petit côté :     - - CE CELSI

- grand côté : CVSTOS BONE NATE MARIE Deuxième fragment (tailloir n° 3) :

HEC VIA CELORVM COLLECCIO SANCTAE-I- -

En dépit du désir légitime de connaître le sens de cette inscription, nous ne proposerons pas ici de traduction, adoptant en cela l'attitude prudente des auteurs du Corpus pour qui « cette inscription apparaît trop fragmentaire pour que l'on puisse en tirer une signification précise » (32). Nous ferons seulement quelques remarques sur sa publication par F. Lacroix : - Nous avons cru pouvoir lire quelques lettres supplémentaires sur le petit côté du premier fragment : CE CELSI au lieu de SI.

- Sur le deuxième fragment, il semble qu'il faille plutôt lire SANCTAE (et non SANCTA), le E étant inversé et raccordé à l'extrémité de la hampe du T. Ce type d'erreur n'est pas rare dans les inscriptions médiévales (Moissac en est un exemple) et ici même le E de COLLECCIO est aussi inversé. Il ne peut guère s'agir d'une simple terminaison décorative du T qui ne figure pas dans les autres T de ces inscriptions.

 

- La dernière lettre du deuxième fragment, où l'on pourrait lire un U, est surmontée, nous semble-t-il, d'un signe abréviatif (titulus) remplaçant la fin du mot. - Enfin, il est impossible de savoir, dans l'état actuel du premier fragment, si le cadre était fermé à gauche du petit côté et à droite du grand, comme le suggère le dessin de F. Lacroix ; notons que la frise se poursuit sur les deux faces sans autre interruption qu'un motif d'angle déjà rencontré à Soréze (tailloir n° 4). En revanche, le cadre n'est pas fermé à droite du grand côté (il l'est dans le dessin publié par F. Lacroix).

 

Quant à la datation, si certaines formes de lettres se rencontrent dès le XIe siècle, plusieurs remarques nous conduisent à la considérer comme plus tardive (33) ;

- Une certaine clarté et lisibilité même si l'on trouve quelques lettres conjointes ou enclavées. - Une préférence pour des formes plutôt arrondies, assez élégantes. Un goût pour les traits contournés permettant de faire des pleins et des déliés, le contour intérieur de la lettre dessinant souvent un bec. - Un souci de variété dans la forme d'une même lettre, une certaine recherche de fantaisie et un goût pour les ornements adventices qui auraient quelquefois tendance à fermer les lettres.

 

- Le choix d'onciales, six E (dont deux inversés) sur huit, le H et les T, O en navette, cinq lettres fleuries (C et V de CVSTOS, E de HEC, A de VIA et premier A de SANCTAE).

Tous ces caractères trahissent l'influence des manuscrits et se rencontrent essentiellement dans la deuxième moitié voire le dernier quart du XIIe siècle ou le début du XIIIe. De plus, la taille est, en réserve, qui peut ailleurs indiquer une haute époque, dans ce contexte-ci, l'indice d'une oeuvre tardive.

Ces deux éléments montrent les différentes étapes du travail du sculpteur depuis la simple gravure, en passant par une esquisse d'ornementation jusqu'à la taille en réserve qui laisse en relief la bordure et les lettres aux contours et à l'ornementation achevés.

 

Quelle que soit la cause de l'inachèvement du travail de sculpture, il nous laisse le témoignage de la coexistence, à la même époque, d'inscriptions en réserve et simplement gravée, prouvant, s'il en était besoin, qu'à cette époque la simple gravure pouvait n'être qu'une étape dans l'élaboration d'une inscription.

 

Il convient de terminer par des œuvres que leur style ou leur décor ne permettent par de rapprocher des séries précédentes.

Il s'agit tout d'abord du tailloir n° 1. Dans les rinceaux entrelacés s'étalent des palmettes au limbe découpé et creusé en cuvette. Il serait à rapprocher d'œuvres moissagaises ou toulousaines.

 

Deux fragments de frise sont ornés de pommes de pin qui se détachent en haut relief sur le fond lisse du chanfrein. Un guillochis figure les écailles.

Nous ne disposons que d'un seul élément de rangées de billettes enchevêtrées, motif pourtant généralement très répandu.

Les têtes d'ange se retrouvent sur trois claveaux et une frise. Elles sont du même type : la tête en haut-relief se détache du fond où sont traités en méplat le nimbe (cannelé sur la frise n° 23) et les ailes à imbrications et longues plumes taillées en biseau. Ces dernières s'accrochent par une sorte de bouton dans un claveau. Sur lesclaveaux, les têtes sont très endommagées voire brisées : la chevelure répartie en bandeaux subsiste seule.

 

Sous les têtes des sortes de vagues sont sculptées en escalier ou gravées sur deux fragments (claveau n° 8). Elles ne semblent pas encore exécutées sur la frise n° 23. Les visages sont conservés sur cette dernière. Ils sont ronds, joufflus, avec un front étroit couvert par une chevelure formant un casque lisse dont la découpe suit le contour des yeux. Ceux-ci ont un globe cerné par des paupières ourlées. Le nez est petit, la bouche est une simple fente.

Enfin deux éléments (divers n° 1 et 2), identiques par leur structure, leurs dimensions et leur décor, posent la question de leur destination. Ils sont composés de deux parties, l'une destinée à être engagée et seulement dégrossie, l'autre taillée par pans lisses sur trois faces et en double « rondin » sur la quatrième, un décor de palmettes et de quatre feuilles sculpté sur la section.

 

Epannelage et décor incitent à placer ces pièces le décor vers soi, palmette dirigée vers le haut. Enfin, le cercle réservé entourant les fleurs sculptées accentue l'impression de pseudo-colonnettes donnée par les rondins. A ce stade deux solutions sont envisageables : soit nous sommes en présence de deux supports, sortes de consoles pour une tablette et il s'agirait d'éléments de mobilier d'église ; soit ce sont deux claveaux (leur section est légèrement trapézoïdale) d'un arc ou d'une voussure dont l'intrados aurait été festonné et le front décoré.

 Nous aurions tendance à préférer la seconde hypothèse car ce type de voussure, pour être original, n'est pas unique, on le retrouve à l'ancienne abbatiale de Matha à Marestay en Saintonge (34) et au portail du croisillon Sud, dit Puerta del Obispo, de la cathédrale de Zamora (35).

Les éléments du type bandeaux, tailloirs et claveaux qui nous sont parvenus montrent la prédominance de frises composées avec des motifs végétaux, alors que selon Victor Allègre, les ornements géométriques sont les plus fréquents dans le Tarn (36).

 

A Soréze, le répertoire est traditionnel mais assez varié. Plusieurs mains ont travaillé à l'exécution de ces frises dont certaines sont peut-être influencées par les grands chantiers voisins de Toulouse et de Moissac. Dans l'ensemble la technique paraît assez sûre. Replacer tous ces éléments dans un édifice (ou plusieurs) dont on ignore tout n'est guère aisé.

Tout au plus, en nous fiant aux caractéristiques de la décoration dans le Tarn, telles que les a définies Victor Allègre, est-il possible de proposer des tailloirs ou des impostes, peut-être prolongés par des bandeaux sculptés soit à l'intérieur de l'église, soit sur la façade principale où ils pourraient être complétés par un décor similaire sur les voussures d'un portail (37).

 

A une voussure appartiennent peut-être aussi les claveaux sculptés d'une tête d'ange. Ce thème de frise se rencontre assez fréquemment dans le Tarn sur les portails (38). Le bandeau dont le chanfrein s'orne lui aussi d'une succession de têtes d'anges ailées, pourrait avoir décoré l'intérieur d'un chœur ou d'une abside comme à Saint-Pierre de Peyregoux (Tarn).

Si notre hypothèse est juste, les deux claveaux à intrados festonné (divers n° 1 et 2) témoigneraient de l'existence d'une voussure de portail ou de fenêtre d'un type original et probablement assez tardif.

 

III. LES MODILLONS

 

Nous avons inventorié quarante trois modillons (39).

Les dimensions

La hauteur, ou épaisseur, varie de 0,12 à 0,30 m, mais se situe généralement autour de 0,20 à 0,24 m.

La largeur prise au niveau du bandeau évolue entre 0,12 et 0,27 m., mais la plupart mesure de 0,15 à 0,18 m., notamment ceux dont la hauteur est de 0,20 à 0,24 m. On note une très grande régularité dans les largeurs alors que les hauteurs sont plus échelonnées.

Les techniques

La queue est toujours dégrossie à la pointe tandis que les faces destinées à rester visibles présentent une taille brettelée, le plus souvent oblique, quelquefois droite sur le fond du cavet, exécutée probablement à la gradine. Cependant certaines surfaces semblent layées ou pointées par traits. Le profil du cavet est généralement un segment de cercle dont la corde serait la base d'un triangle isocèle (les côtés égaux étant la profondeur et la hauteur du cavet).

Le relief de la sculpture qui orne le cavet dépend du sujet traité. Il peut varier de 3,5 cm dans le cas d'un décor plaqué sur le fond (modillons nos 1 et 2) à une vingtaine de centimètres dans le cas de têtes humaines. L'ébauche semble avoir été exécutée à la pointe dont les traces ont ensuite été éliminées par un travail au ciseau ou avec un outil bretté. La taille reste quelquefois grossière sur le fond ou des parties sculptées peu visibles.

 

Certains modillons présentent quelques particularités : un cavet chanfreiné sur trois côtés (sur 8 modillons ; sur 3 autres le chanfrein est incertain), l'arête inférieure du bandeau est convexe dans deux modillons, deux autres n'ont pas ou n'ont plus de bandeau. Enfin la sculpture d'un modillon (n' 1) est exécutée selon une technique très particulière : le motif, un oiseau, est sculpté en méplat sur une plaque réservée sur le cavet, d'une épaisseur de 3,5 cm environ.

Les sujets représentés pour plus de facilité nous avons dressé quelques tableaux susceptibles de donner une idée de l'iconographie de ces modillons.

Cependant, ils n'auront qu'une valeur indicative, car plus on affine la classification plus elle devient sujette à caution lorsqu'on ne dispose pas d'un ensemble complet.

 

 

 

  b)       Tableau n° 3

 

Animaux tirant la langue

Animaux grimaçant

Animaux dévorant

Chiens loups Chat sans dent Non identifiés   Chiens loups Chats Non identifiés
        Apparentés Apparentés  
4 3 1 2 4 1 1
        6    

 

  SUJETS DEVORES

 

 

 

 

 

 

 

 Il est aisé de constater à partir de ces tableaux que l'iconographie des modillons de Soréze est relativement traditionnelle. La prédominance de la représentation animale est incontestable, même en tenant compte de la perte d'un nombre important de modillons susceptible de fausser les statistiques (41).

 

 

La figuration animale

 

Elle ne semble pas exceptionnelle encore qu'à Soréze, elle soit écrasante. Les animaux choisis pour orner les modillons sont généralement domestiques ou relativement familiers et c'est la tête qui est fréquemment représentée.

Cependant ces têtes animales ont quelquefois été interprétées avec l'intention probable de les rendre inquiétantes, voire monstrueuses. Ainsi le chat, avec ses petites oreilles pointues, ses grands yeux et sa face aplatie pouvait servir de modèle à une représentation de démon (42). Le chien et le loup sont difficiles à distinguer l'un de l'autre ; mais souvent figurés en train de dévorer un objet, un animal ou un être humain (ce qui les apparenterait plutôt aux loups), ils expriment une idée du mal, voire même peut-être du châtiment lorsque c'est un homme qui est dévoré.

 De même les animaux qui tirent la langue ou montrent les dents (chats, chiens et apparentés).

 

Au contraire, les bovins, caprins et lapin sont figurés de façon plus naturelle ou réaliste, tels des témoins de la vie quotidienne que leur utilité a sans doute préservés de déformations démoniaques.

Le serpent, symbole du Mal par excellence, a fourni aussi un thème très décoratif.

 

D'un point de vue stylistique, des œuvres de qualité voisinent à côté de sculptures moins élaborées.

La représentation des bovins et des caprins est simplifiée, privilégiant la forme et le volume aux détails souvent simplement gravés (43). Les rares quadrupèdes sommairement figurés sont difficiles à identifier.

 

Les têtes de chat sont généralement rondes, leur face plate voire concave animée par deux yeux quelquefois tombants et un nez mince et plat. Sur deux modillons (n°, 17 et 18), elles ont donné lieu à des compositions très décoratives où le sculpteur a tiré parti d'un détail, les moustaches ou la langue, traitées comme des feuillages, pour agrémenter le schéma général d'un ornement. C'est le cas également des moustaches du lapin (n° 12).

 

Les chiens-loups ont une tête allongée, proche du trapèze. Le museau est traité comme deux pans coupés avec soit une simple arête soit un mince bourrelet comme axe de symétrie. Les yeux sont plus étirés que ceux des chats et leur globe est biseauté. Les dents sont toujours représentées (elles le sont quelquefois dans les gueules de chat). Sur un modillon (n° 25) une crinière réservée ornée d'un guillochis couvre le front. L'introduction de serpents dans la gueule du chien-loup du modillon n° 24 renouvelle la composition par l'aspect décoratif des serpents et de leurs enroulements tout en donnant une image plus subtile de l'animal dévorant puisqu'il est ici lui-aussi dévoré par les serpents.

Sur le modillon n° 2 deux serpents lovés s'entrelacent et se mordent la « queue » ; sur leur corps, des stries parallèles s'ajoutent aux traits gravés en chevrons pour figurer les écailles.

 

La représentation humaine ou anthropomorphe

 

Sept modillons portent une tête d'homme et un seul une tête d'ange. Dans trois modillons, des animaux dévorent un être humain : une tête (modillon n° 26), un homme ou un enfant figuré en entier (modillon n° 25) et la moitié inférieure d'un corps (modillon n° 19). Un seul a pour thème principal un personnage entier, un acrobate (mod. n° 39) (44).

 

Les têtes humaines ou d'ange se répartissent en deux séries. L'une est représentée par un type très particulier, presque sans âge, et l'autre par un type que nous pourrions qualifier de roman.

 

Dans le premier groupe, si l'on retrouve des caractères communs, la morphologie varie assez sensiblement. Toutes sont caractérisées par une stylisation qui n'a retenu que les organes essentiels (yeux, nez, bouche, oreilles) pour être représentés aux dépens du modelé et de détails tels que les cheveux qui sont absents sauf sur le modillon n° 34 où ils sont suggérés par des traits gravés. Le front est généralement étroit (voire absent dans le modillon n° 33). Les yeux, enfoncés ou exorbités, ont un globe saillant et des paupières ourlées plus ou moins épaisses.

Ils sont ronds ou en amande. Le nez est proéminent et large, il est long dans trois cas et court dans deux autres. La bouche est figurée par une simple fente, parfois concave ou convexe. Le menton, soit très long, soit mieux proportionné est toujours assez accusé. Les oreilles, placées très haut, sont représentées par un bourrelet en demi-cercle ou en forme de D.

 La face est généralement plate, les côtés de la tête constituent de vastes plages unies, aucun modelé facial n'est rendu.

 

Enfin, d'un point de vue technique, ces têtes sont presque toutes couvertes de stries résultant d'une taille droite, quelquefois légèrement oblique sur les joues et le menton. Ce sont sans doute les traces d'un outil bretté tel qu'une gradine.

Ces caractères communs n'excluent pas des variations dans la morphologie. Certains visages sont très allongés (le nez et le menton sont longs), d'autres larges et courts sont presque triangulaires (nez et menton plutôt courts).

Cette série de têtes humaines fait inévitablement songer aux têtes coupées celtiques comme celles de Roquepertuse. Sans doute est-il possible de voir dans ces œuvres sorèzienne un mode de représentation et d'expression ressurgi du fond des âges, la permanence d'une tradition artistique.

 Ce n'est pas un cas isolé dans l'art roman et ce type de représentation se retrouve principalement sur des modillons(45).

 

Trois autres têtes apparaissent plus caractéristiques de la période romane, même si elles présentent quelques traits communs avec le groupe précédent. Il s'agit d'une tête d'homme (modillon n° 37), d'un visage probablement féminin (dévoré par un animal, modillon n° 26) et d'une tête d'ange (modillon n° 38) (46).

Sur le premier (n° 37), le visage, assez bien proportionné, est trapézoïdal. La chevelure tombe en mèches droites tout autour de la tête, sur le front étroit mais sans couvrir les oreilles, plantées très bas et en arrière. La face est plate, animée par deux yeux en amande rapprochés, un nez mince, et une bouche qui s'arrondit en bourrelet autour d'un objet ovoïde.

 

Le visage féminin semble plus carré mais tout aussi aplati. Les cheveux se répartissent en bandeaux sur les tempes. Les yeux sont ronds, le nez petit entre des pommettes hautes et saillantes. Une fente concave figure la bouche.

 

Le traitement général de l'ange rappelle celui des têtes d'angelots de la frise et des claveaux : les détails (nimbe, ailes, cou et encolure) sont gravés ou méplats tandis que la tête se dégage en très fort relief. Le visage ovale se caractérise par un raccourcissement de la moitié supérieure et l'allongement de la moitié inférieure.

La chevelure tombe en mèches droites autour de la tête, la frange coupée suivant le contour des arcades sourcilières. Les yeux, un peu enfoncés, ont un globe saillant biseauté et des paupières ourlées. Le nez est petit et un peu aplati. La saillie des pommettes est accentuée par le creusement des sillons naso-labiaux et l'étirement des muscles autour d'une petite fente à peine concave qui représente la bouche. Le menton rond est proéminent.

 

Le visage du petit homme ou de l'enfant dévoré par un loup (modillon n° 25) peut être rapproché de ceux précédemment décrits : chevelure en mèches droites, très courtes pour la frange qui couvre un front étroit, grands yeux globuleux, nez plat, pommettes saillantes, bouche incisée, menton assez long et carré. Celui-ci exprime cependant un sentiment de peur et de souffrance traduit par ses yeux agrandis et exorbités, le rictus de la bouche qui accuse les sillons naso-labiaux et mento­labial, et par son geste (le personnage, les bras levés, se tient en effet la tête). La disproportion entre la tête, les mains et le reste du corps résulte d'une volonté de mettre l'accent sur les parties les plus expressives.

L'anatomie n'est guère réaliste avec ses mains grossières, ses côtes représentées par des traits gravés en chevrons.

 

D'un autre personnage dévoré par un monstre plutôt félin, seules une main et les jambes frêles et fléchies (il est à genoux) sont visibles.

Le mauvais état du modillon n° 39 nous prive de la représentation d'un acrobate exécutant un exercice à la barre fixe. En appui sur les bras, le corps retourné sur lui-même, les jambes devaient rejoindre la tête. Ne subsistent que les bras, assez courts, et le buste arqué suivant la courbure du cavet.

On ne peut rien dire du costume, probablement assez simple, sorte de tunique qui devait s'élargir au niveau des cuisses par un pli creux.

Quant aux motifs géométriques ou purement décoratifs des modillons, ils se réduisent à une sorte de poulie et à un bouton de fleur.

 

Les dimensions de ces modillons ne donne pas d'indication sur leur localisation dans un édifice (47). Leur iconographie n'est pas exceptionnelle: « les masques humains » (essentiellement masculins ici), « les gueules de monstres, et des animaux imités du réel se mêlent aux bêtes sorties de l'imagination ou résultant de spéculations de nature symbolique » (48). L'ensemble des thèmes traités ici s'oriente plutôt vers une représentation du mal, par la tentation, le péché et le châtiment.

Dans la région, les modillons se rencontrent essentiellement au chevet, et plus précisément à l'abside (49) sur la façade au-dessus du portail, et plus rarement aux murs latéraux (50).

 

Victor Allègre a remarqué que les modillons ornant l'abside n'atteignaient généralement pas la qualité d'ensemble de ceux des façades (51). Le nombre de ces éléments trouvés à Soréze peut paraître élevé pour un seul édifice, mais ne permet pas de conclure de façon définitive qu'ils proviennent de deux églises différentes (52).

Stylistiquement, ces sculptures sont assez inégales. Elles se caractérisent toujours par la vigueur du relief, le goût des volumes bien dégagés, proches de la rondebosse(53). Dans bien des cas, la relative grossièreté du travail (54), peut-être délibérée, n'exclut pas la puissance d'expression (55).

 

Une des caractéristiques quasi-générale des modillons est de fournir un support à l'expression d'un art plus populaire et par conséquent plus difficile à dater, d'autant que les études approfondies de ce type de sculpture font plutôt défaut. Dans le cas de Soréze, la plupart semblent dater du XIIe siècle (56) et il est probable que l'on soit en présence d'une série plus homogène que celle des chapiteaux figurés ou feuillagés mais il convient de nuancer si l'on compare le modillon n° 1 avec le n° 38, ce dernier, orné d'une tête d'ange, pourrait ne dater que du XIIIe siècle.

 

SYNTHESE SUR LA SCULPTURE MEDIEVALE DE SOREZE

 

Un histogramme (Pl. II) des éléments sculptés romans classés par destination met en évidence certaines disproportions dues probablement aux hasards de la conservation des vestiges et de leur inventaire. Ainsi, on pourrait s'attendre à un nombre important de chapiteaux - s'agissant en principe d'une abbaye - alors qu'ils ne représentent que 13 % du total contre 29 % pour les modillons. La faible proportion de chapiteaux figurés est d'ailleurs assez surprenante.

On n'obtient pas non plus de pourcentages voisins pour des éléments qui en principe vont de pair : bases et socles (7 %), colonnes (20 %) et chapiteaux (13 %). Les données quantitatives ne fournissent donc aucun indice intéressant.

 

Les dimensions, en revanche, permettent quelques rapprochements tels que la superposition possible de la plupart des bases avec des tambours de colonnes et la série des chapiteaux corinthiens. Tous ces éléments étaient prévus pour être engagés ou adossés et les diamètres sont sensiblement égaux. Ils pourraient être attribués à la structure et à la décoration intérieure d'une église.

 

Toutefois sept tambours de colonnes ont un méplat large de 0,35 m à 0,44 m et un seul présente un diamètre de 0,44 m; les plus petits pourraient aller sur les socles, mais aucun chapiteau ne s'y adapte. Les deux plus petites bases admettraient certains fûts de colonnettes retrouvés, lesquels conviendraient à des chapiteaux figurés ou à décor végétal.

 

Ces derniers, d'après des critères de dimensions, proportions et structure (nombre de faces sculptées), peuvent se répartir en deux catégories :

- l'un comprend des chapiteaux angulaires (ch. n°5 14 (?), 15, 16, 11) dont la corbeille est haute et étroite, peut-être conçus pour des ébrasements de portail, les chapiteaux nO5 14 et 15 se distinguent des autres par leurs grandes dimensions et ont sans doute appartenu a un autre ensemble (un portail plus important par exemple) ;

 

- l'autre groupe serait constitué de chapiteaux sculptés sur trois ou quatre faces (nO5 18 et 19) ou dont les dimensions sont voisines, avec des corbeilles assez évasées (nO5 17, 12 et 13) ; ils conviendraient à la rigueur à une claire-voie de cloître.

 

L'ensemble des fragments de bandeaux et des tailloirs décorés de frises est difficile à restituer. Nous avons évoqué la possibilité de bandeaux prolongeant des tailloirs ou des impostes, soit à l'intérieur de l'église, soit en façade. Le tailloir n° 6 en fournit la preuve puisqu'il est sculpté sur trois faces prolongées par des retours. Nous disposons de peu de pièces complètes et donc de dimensions exactes. Les quelques tailloirs ou impostes à peu près intacts étaient engagés (nos 1, 6) ou angulaire (n° 4), mais ne correspondent vraiment bien à aucun des chapiteaux retrouvés ; un élément comme le tailloir n° 7 serait plutôt une imposte qu'un tailloir si l'on en juge par sa longueur. Il eut été du plus grand intérêt de connaître la destination des deux fragments portant des inscriptions (tailloirs nO5 2 et 3) mais leur état, notamment leur faible profondeur, ne permet aucun rapprochement satisfaisant.

 

Quant aux claveaux, et plus particulièrement les éléments de voussures, ils présentent souvent le même décor, quand ils n'ont pas été exécutés par la même main, que des fragments de bandeaux. Ainsi, tout en restant dans le domaine des hypothèses, mais vraisemblables, on doit pouvoir suggérer un portail dont un ou plusieurs rouleaux (probablement ceux situés le plus à l'extérieur) étaient ornés d'un motif reproduit soit sur des naissances (dans le cas d'une archivolte), soit sur des impostes ou des tailloirs (57). Les claveaux ornés d'une tête d'ange pourraient éventuellement être rattachés à un portail, comme c'est le cas fréquemment, peut-être comme seuls souvenirs de compositions plus savantes où une cour céleste entoure le Christ en majesté du Jugement Dernier.

Enfin, il faut songer à une décoration extérieure assez développée sous forme de modillons figurés.

 

Nous disposons au total d'un nombre assez important d'éléments pouvant se rapporter à une ou deux églises. Or nous n'avons pu résoudre la question de leur attribution. Si l'on ne peut trancher avec certitude pour l'église paroissiale ou pour l'abbatiale, il est une troisième solution qui admettrait la double origine de ces sculptures. Rien ne s'oppose à ce que les deux édifices aient été élevés et décorés simultanément ou presque (58). La désertion progressive de la vieille ville de Berniquaut, définitive dans la deuxième moitié du XIIe siècle, a pu profiter aussi bien à la ville de Soréze (59) qu'à l'abbaye.

 

Dans ces conditions, la paroisse qui dépendait d'ailleurs du monastère, pouvait profiter de la présence d'ateliers travaillant à l'abbatiale, ou s'inspirer de leurs œuvres.

 En dernier ressort on pouvait espérer différencier la production artistique sur l'un et l'autre chantier. Cette piste doit elle aussi être abandonnée : les œuvres sorties du chevet Saint-Martin où elles étaient remployées ne sont pas d'une moindre qualité. Il faut en définitive accepter cette incertitude en espérant qu'elle soit un jour levée. Il reste qu'un ensemble aussi considérable de vestiges romans ne peut guère provenir d'une simple paroissiale.

Des vestiges propres à une abbaye comme ceux d'un cloître constitueraient une preuve supplémentaire.

A Soréze, ils sont fort peu nombreux. A peine quelques fûts de colonnettes, quelques chapiteaux sont-ils attribuables à cette partie du monastère.

De plus, nous n'avons retrouvé aucun chapiteau double.

 

L'iconographie de ces sculptures ne nous apprend rien non plus quant à leur appartenance. Elle apparaît, nous l'avons montré, très traditionnelle et s'intègre parfaitement au répertoire de l'Albigeois. Le monde végétal est très présent, qui déroule sans fin ses rinceaux et ses feuilles diversement agencés en un décor sans surprise, mais facile à reproduire et dont l'effet est assuré. La végétation revêt pourtant un aspect plus exotique dans la représentation du Paradis sous la forme d'arbustes et d'un palmier qui prouve, s'il en était besoin, la connaissance d'autres œuvres où ce motif était reproduit. Le monde animal est, là aussi, souvent inquiétant. Recréé, il est chargé d'exprimer, à travers des êtres pourtant familiers, le danger, le mal, la souffrance, et d'inspirer la crainte ; et c'est à condition qu'il ait été repensé et interprété, de façon quelquefois très décorative, qu'il est attirant (60). L'homme est plus rarement représenté.

 

Il apparaît alors souvent la proie de ces monstres ou ben victime de sa propre faute. Mais dans la série des têtes humaines sculptées sur des modillons, certaines semblent sereines, avec l'ébauche d'un sourire, tels des témoins sans âge, hors du temps. Pas de visages tordus, grimaçants comme on en rencontre souvent(61), tout au plus une expression de surprise, peut-être d'impuissance devant le destin.

 

Face à cette insistance sur le mal et les différentes formes qu'il revêt, on ressent l'absence de l'autre volet, celui de la Rédemption, que seules quelques têtes d'anges et surtout celle du modillon nous laissent entrevoir.

 Certes, on nous a rapporté la destruction d'un autre modillon qui aurait été décoré d'un agneau, mais nous ne pouvons rien fonder sur ce seul témoignage oral.

Ce double aspect est pourtant probable puisqu'il apparaît fréquemment dans les églises romanes :« d'un côté (de préférence sur les portes ou dans les absides) le triomphe du Christ, (...) thème de la victoire de Dieu sur le mal, la peur et la mort ; de l'autre, l'accumulation des monstres qui pourrait se concevoir comme un symbole plus ou moins conscient du désordre du monde, née du désir de rassembler dans la maison de Dieu tous les tourments, péchés et obsessions des hommes pour s'en délivrer par la victoire du Tout-Puissant (...) les monstres seraient vaincus et enchaînésdans les cloîtres et les églises où l'homme célèbre la miséricorde et la grandeur de Dieu » (62).

 

Quant à la place qu'occupe tout cet ensemble sculpté dans l'art roman régional, elle découle de la datation des œuvres qui le composent, de leurs styles, des influences subies et de leur rayonnement éventuel.

Nous l'avions vu lors de notre précédent article, on peut, sans trop d'erreur commencer par la série des chapiteaux de type corinthien altéré, qui témoigne d'un manque de culture dans le domaine des traditions décoratives lié à l'absence quasi-totale, dans cette partie du Languedoc, de vestiges antiques. Cette production sesitue fort probablement avant l'ouverture de grands chantiers voisins comme Saint-Sernin de Toulouse.

 

Une étape est franchie avec l'introduction de tout le répertoire végétal qui envahit les bandeaux et les tailloirs, s'entrelace et couvre des corbeilles de chapiteaux.

On retrouve ici l'écho, faible et sans doute tardif, de ce grand courant qui diffuse le thème de l'entrelacs, devenu rinceau ici, associé au fleuron, à la palmette et même à la figuration animale

. Cette dernière anime alors des chapiteaux exécutés par des artistes qui n'ignorent plus les réalisations contemporaines, même lointaines. Si la production artistique semble se concentrer dans le premier quart du XIIe siècle, elle ne s'arrête pas brutalement et compte encore des œuvres du dernier quart de ce siècle et du suivant.

 

L'échelonnement dans le temps rend impossible la définition d'un style propre à Soréze que contredirait d'ailleurs la qualité inégale des pièces sculptées. Au mieux pourrait-on retenir un goût quasi-général pour le relief bien dégagé, les volumes vigoureux (63).

 

Cette tendance à la ronde-bosse est surtout sensible dans les modillons. Le travail apparaît souvent rudimentaire, presque grossier, mais ce manque de finition, de poli, semble, dans bien des cas, volontaire. Quant aux compositions, elles sont généralement fondées sur la symétrie. Il est probable que l'on puisse considérer comme des « recettes » d'atelier la construction de têtes animales ou humaines à partir de l'axe nasal ou la manière d'assurer une transition entre le décor d'une corbeille et son registre supérieur où subsiste un épannelage de type corinthien.

Dans l'ensemble, les artistes qui ont travaillé à Soréze semblent plus à l'aise dans l'ornementation végétale et la figuration animale que dans la représentation humaine.

Les sculpteurs appelés à Soréze n'appartiennent donc pas à des ateliers de premier plan. Il ne s'agit pas non plus du simple tailleur de pierre. Ces œuvres sont d'une qualité moyenne dans leur ensemble, comptant quelques belles pièces et des imitations plus médiocres.

 

En l'absence d'un maître de grand talent, dont le style soit repérable ailleurs, il n'est guère aisé de dire si l'art roman tel qu'il apparaissait à Soréze a eu un rayonnement, même local. De l'abbaye ne dépendaient que des petits prieurés-cures, mais pas d'établissement important. Peut-être une influence, très limitée, peut-elle se déduire de deux cas bien précis.

Les fragments de frise, en remploi à la naissance droite de l'archivolte du portail de la chapelle castrale à Saint-Félix-de-Lauragais, sont stylistiquement très proches d'une série de Soréze ; une étude approfondie de la façade de cette chapelle permettrait peut-être de préciser la date du remploi et fournir un indice sur leur origine : ces éléments peuvent-ils être considérés comme provenant de Soréze ? Ou comme une imitation ou une production contemporaine du même atelier, auquel cas ils indiqueraient un rayonnement de ce chantier ? Beaucoup plus éloigné, le modillon de La Salvetat, où l'on voit un petit homme dévoré par un loup, si proche par son thème et par sa composition du modillon n° 25, mais si différent par son style, serait-il inspiré de celui de Soréze (64) ?

 

La production sculptée de Soréze à l'époque romane ne se singularise guère de celle de l'Albigeois dans son ensemble. Elle illustre l'éclosion artistique de cetterégion aux XIe et XIIe siècles, marquée par de multiples courants, des influences extérieures souvent diffuses sur des ateliers locaux au rayonnement limité et dont aucun, même à Albi, n'apparaît de premier ordre. Par la suite, on note à Soréze comme dans le reste de la région un attachement à des motifs ou des formules romans sous une forme « décadente ».

 

Les influences extérieures, que nous avons qualifiées de diffuses, sont aussi très diverses. On pourrait évoquer de multiples rapprochements, mais toujours très ponctuels, pour tel motif décoratif ou tel thème iconographique, mais aucune influence n'apparaît vraiment décisive. Ainsi Soréze ne reste pas à l'écart de grands courants artistiques qui véhiculent des modèles comme le chapiteau à entrelacs et ses dérivés, le thème de la sirène si répandu dans le centre de la France et les régions limitrophes, ou encore « l'art roman décadent du Sud-ouest ».

Le rôle d'un grand foyer de sculpture aussi proche que Toulouse ne semble pas déterminant. On peut lui attribuer celui de « bain de culture», où l'effervescence de la création a pu engendrer un climat propice à l'apprentissage et à la diffusion de modèles de chapiteaux, corinthiens ou à feuillages et à l'introduction de chapiteaux figurés ou historiés. Nous avons cru discerner son apport dans un certain nombre de frises dont les motifs, et quelquefois le style, rappellent Saint-Sernin de Toulouse et même Moissac, dans des représentations d'oiseaux, de dragons ou de têtes d'anges. Mais on ne peut que constater la faiblesse de l'apport de ces deux grands centres que sont Toulouse et Moissac, à Soréze comme dans le reste de l'Albigeois.

« Ceci s'explique par le fait que leurs zones d'expansion se situent dans d'autres directions. Moissac s'est réservé le Quercy et le Bas-Limousin. Toulouse (...) s'oriente vers la région pyrénéenne » (65). Il est probable aussi que, pour des raisons géographiques et politiques, l'Albigeois, et surtout sa zone méridionale, aient davantage été tournés vers le Languedoc méditerranéen.

 

 Le Sorèzois et le Revelois constituent un vaste couloir naturel orienté vers Castelnaudary et au-delà vers la Méditerranée, alors qu'ils sont séparés de Toulouse par la ligne de coteaux du Lauragais. De plus, on est ici dans la mouvance des Trencavel. Pourtant l'influence du Languedoc et de la Catalogne n'est pas non plus déterminante dans le domaine de la sculpture romane.

Soréze semble donc se situer dans une zone à la limite du rayonnement des deux centres artistiques que sont Toulouse et Saint-Gilles, dans une zone « où le plus souvent, il est même impossible de déterminer avec précision les origines stylistiques de cette production plus ou moins populaire » (66).

« Pays largement ouvert aux influences extérieures » (67) mais dont aucune n'est décisive, du moins à Soréze, et où « même Albi ne réussit pas à créer un véritable chantier de sculpteurs romans » (68), il s'attarde dans une forme « décadente du roman.

  

ANNEXE : FICHES DE CATALOGUE

 

Liste des publications mentionnant ou reproduisant certaines pierres sculptées et auxquelles il est fait référence dans quelques fiches :

1) - 1883 - Légendes du plan géométral de la ville dePuyvert sur le sommet de la Montagne de Berniquaut (près Soréze) et relevé en 1824, dans Revue du Tarn, 1883, T. IV, p. 372 et 373 (quelques croquis). Le plan est accompagné de dessins de sept « sculptures provenant de Puyvert » dont deux gothiques, et de croquis de chapiteaux du clocher Saint-Martin.

2) - 1913 - F. LACROIX, Quelques renseignements sur la vieille ville de Soréze (Tarn), Toulouse, 1913, 18 dessins h.t. et 1 plan h.t. Sur les sculptures romanes, voir en particulier texte et dessins p. 14 à 21.

3) - 1964 - Jean MISTLER, Le Bout du Monde, (Grasset 1964), réed. Livre de Poche 1973, 284 p., voir p. 86-87 où l'auteur mentionne quelques sculptures dans la maison de sa tante.

4) - 1974 - Yves BLAQUIERE, Catalogue de l'Exposition De l'oppidum de Berniquaut à l'abbaye de Soréze, Maison du Parc Naturel Régional du Haut Languedoc à Soréze, 3-31 août (1974), 20 p., 21 x 29,7 cm, sculptures romanes p. 15 à 20 (non paginé).

5) - 1976 - Jacques FABRE de MASSAGUEL, Catalogue de l'Exposition l'Ecole Royale Militaire de Soréze sous l'Ancien Régime, à l'occasion du bicentenaire, 1776-1976, exposition tenue à la Maison du Parc Naturel Régional du Haut-Languedoc à Soréze du 8 mai au 15 septembre 1976, Dourgne, 1976, 180 p., voir « catalogue des pierres sculptées de l'abbaye de Soréze », p. 19-20 (8 numéros, catalogue non détaillé).

 

  NOTES INFRA PAGINALES

 

 (1) Cf Nelly POUSTHOMIS-DALLE, Les chapiteaux de type corinthien altéré de Soréze (Tarn), dans Archéologie du Midi Médiéval, Tome 2, 1984, p. 71 à 80. Pour l'historique de l'abbaye Sainte-Marie de Soréze, se reporter à cet article et pour plus de détails voir notre thèse : Nelly POUSTHOMIS-DALLE, L'abbaye de Soréze (Tarn). Recherche archéologique, Université de Toulouse-le­Mirail, 1982, tome I, texte notamment p. 17 à 110.

(2) Pour plus de commodité nous avons conservé la numérotation des éléments adoptée dans notre thèse (supra note 1) à savoir de 1 à x pour chaque catégorie (chapiteaux, modillons, etc.). La série de type corinthien précédemment publiée comportant dix numéros, la numérotation reprend ici à 11. Chacun des chapiteaux étudiés fait l'objet d'une fiche de catalogue assortie d'une photographie, en annexe de cet article.

(3) Nous devons à M. Marcel Durliat une mise au point sur un type de chapiteau dont le répertoire décoratif est « à base de tiges nouées ou entrelacées accompagnées de fleurons et de palmettes », décor « qui se déroule librement selon un dessin assez lâche », cf. M. DURLIAT, Les plus anciens chapiteaux de la cathédrale du Puy et leur place dans la sculpture du Xle siècle, dans Cahiers archéologiques, n° 32, 1984, p. 63 à 88. M. Durliat rapproche les plus anciennes œuvres de cette cathédrale de chapiteaux de la région de Clermont-Ferrand, d'Issoudun, ou encore de Tournus, de San Pedro de Roda, sans oublier les premiers chapiteaux de Bernay, petit ensemble qui paraît isolé en Normandie et qui avait déjà fait l'objet d'une publication par Louis GRODECKI, Les débuts de la sculpture romane en Normandie: Bernay, dans Bulletin Monumental, T. CVIII, 1950, p. 7 à 67, et notamment p. 26 à 47. Selon M. Durliat, « l'art du fleuron serait donc remonté de la Méditerranée vers le centre de la France en s'enrichissant de motifs nouveaux » (Ibidem p. 86).

(4) Comme sur un chapiteau du chœur de l'église de Merlande en Périgord, cf. Jean SECRET, Périgord roman, La-Pierre-qui-vire, 1978, Zodiaque, coll. La Nuit des Temps n° 27, fig. 125. Voir aussi les chapiteaux provenant de la crypte de Notre-Dame d'Issoudun et conservés au musée municipal de cette ville. Le passage entre le cercle et le rectangle (entre la colonne et le tailloir) se fait « par le biais de surfaces planes dessinant des triangles et des parallélogrammes » délimités par une tige, cf. M. DURLIAT, Les plus anciens chapiteaux..., art. cité, p. 78, notamment les deux grands chapiteaux sculptés sur quatre faces, encore que leur décor végétal de fleurons et palmettes y conserve assez de souplesse à la différence du chapiteau n° 12 de Soréze.

(5) Les feuilles supérieures d'un rameau se recourbent vers le centre en forme de cœur enserrant un fruit, motif que l'on retrouve sur le chapiteau n° 18 par ailleurs très différent stylistiquement.

(6) Un doute subsiste pour le n° 14 qui est encastré dans une maçonnerie.

(7) A Loarre, chapiteau Nord de l'arc triomphal à l'entrée de l'abside et à Jaca, chapiteau de la nef, cf. G. GAILLARD, Les débuts de la sculpture romane espagnole, Leon, Jaca, Compostelle, Paris, 1938, p. 103-104, pl. XLIV n° 23 et p. 141, pl. LXV n° 16.

(8) Sandro CHIERICI, Lombardie romane, La-Pierre-qui-vire, 1978, coll. Zodiaque, La Nuit des Temps n° 48, fig. 2 et 28.

(9) Adriano PERONE, Pavia. Musei civici del castello visconteo, Bologne, 1975, fig. 178 (Musei d'Italia, Meraviglie d'Italia).

(10) G. GAILLARD, Les débuts de la sculpture..., ouv. cité, p. 151.

(11) Chapiteau du musée du Louvre inv. 2293, cf. Jacques GARDELLES, L'art roman, dans Sculpture médiévale de Bordeaux et du

Bordelais, catalogue d'exposition, Bordeaux, Musée d'Aquitaine, 1976, n° 80, p. 85 et 86.

(12) Imposte, Musée d'Aquitaine de Bordeaux inv. n° 11.721, provenant de la cathédrale Saint-André de Bordeaux, Ibidem, n° 81,

p. 87 et 89 ; chapiteau, Musée d'Aquitaine inv. 11.708, provenant de l'église de La Brède (Gironde), Ibidem, n° 90, p. 96 et 97. (13) Chapiteau double, Ibidem, n° 96, p. 102-103.

(14) Léon PRESSOUYRE, Les chapiteaux romans de Sainte-Croix-du-Mont au château de Castelnau-Bretenoux, dans Bulletin Monumental, 1978, t.136 n° 1, p. 7 à 33, notamment p. 28 et notes 33, 34 et 35 p. 32. Un chapiteau du transept de Saint-Eutrope

de Saintes présente une rangée de personnages, un genou à terre, surmontés d'une rangée de quadrupèdes puis d'oiseaux.

(15) Jean CABANOT, Burlats, dans Congrès Archéologique de France. Albigeois,(1982), Paris, 1985, p. 198.

(16) Marcel DURLIAT, Haut-Languedoc roman, La-Pierre-qui-vire, 1978, Zodiaque collection La Nuit des Temps n° 49, p. 267. (17) William D. WIXOM, Romanesque sculpture in American Collections -XVII- The Cleveland Museum of Art, dans  Gesta, vol.

XVIII/2, 1979, p. 38-39 et fig. 2a et 2b, p. 39. L'auteur rapproche cette ceuvre de celles de Sainte-Croix-du-Mont, d'un chapiteau

du porche de Saint-Seurin de Bordeaux et d'un autre de l'église de Loupiac.

(18) La sirène est un thème fréquent dans la sculpture romane en Auvergne et en Rouergue, notamment à Sainte-Foy de Conques, et dans le Tarn à Burlats, Denat, La Salvetat (commune de Montdragon).

 (19) Paul MESPLE, L'art roman décadent du Sud-ouest, dans Bulletin Monumental, T. CXV, 1957, p. 7-22.

(20) Marguerite VIDAL, Pierres romanes au Musée de Moissac, dans Moissac et sa région. Congrès de la Fédération des Sociétés Académiques et Savantes Languedoc-Pyrénées-Gascogne (1963), 1964, p. 42-52 et surtout p. 44 et 45.

(21) Voir notamment dans la revue Gesta les inventaires publiés sous la rubrique Romanesque sculpture in American Collections :

- Walter CAHN, VI- The Boston Museum of Fines Arts, dans Gesta, vol. IX/2, 1970, 4 et 5, p. 64-65 ;

- Idem, XVI - The Academy of New Church, Bryn Athyn, Pa., dans Gesta, vol. XVI/2, 1977, 15 a, b, c et d, p. 75-76; - William D. WIXOM, XVIII - The Cleveland Museum of art, dans Gesta, vol. XVIII/2, 1979, 8, p. 45-46.

- Kathryn HORSTE, XX- Ohio and Michigan, dans Gesta, vol. XXI/1, 1982, Ohio -Cincinnati Art Museum n° 2, p. 108-109

et The Toledo Museum of Art n° 3, p. 133, fig. 25, p. 132.

(22) Pour les chapiteaux angulaires, aux corbeilles hautes et étroites (n° 11, 14, 15 et 16).

(23) Pour les chapiteaux aux corbeilles équilibrées, sculptées sur deux ou trois faces (n° 12, 13, 17, 18 et 19).

(24) Le nombre assez élevé d'éléments inventoriés ne permet pas de publier ici la totalité des fiches du catalogue. Nous avons donc sélectionné les fiches et photographies des pièces les plus significatives par leur décor ou leur style, en leur conservant leur numéro d'inventaire (les frises sont numérotées de ( à 24, les tailloirs ou impostes de 1 à 18, les claveaux de 1 à 11).

(25) L'état fragmentaire d'un grand nombre de pièces rend leur classification délicate. Lorsqu'elles présentent au moins deux faces perpendiculaires taillées ou sculptées, elles sont regroupées sous les termes de tailloirs ou impostes. Dans tous les autres cas (éléments brisés aux deux extrémités ou taillés sur une ou deux faces latérales mais avec interruption arbitraire du décor) nous avons dû nous limiter à les rassembler sous le terme générique de frises. Il ne faut toutefois pas perdre de vue qu'une pièce brisée aux deux extrémités pouvait appartenir à un tailloir ou à une imposte et que sa prise en compte parmi les frises faussera les statistiques, notamment celles des motifs décoratifs en liaison avec la destination des supports.

(26) Mais il faut tenir compte de la réserve faite supra note 25. (27) Ibidem.

(28) Ibidem.

(29) Alors que les bandeaux et les pans présentent une taille brettelée oblique.

(30) M. Jacques Gardelles indique, à propos d'un chapiteau à décor végétal d'un style voisin de nos frises: « Le faire « gras » est fréquent dans l'art roman de la France de l'Ouest », dans L'art roman, dans Sculpture médiévale de Bordeaux et du Bordelais, Bordeaux, Musée d'Aquitaine, 1976, n° 62, p. 72 et 73. Voir également un décor de palmettes exécuté dans un style voisin sur des chapiteaux provenant de l'église de La Brède (Gironde), Ibidem, 88 à 91, p. 94 à 97.

(31) F. LACROIX, Quelques renseignements sur la vieille ville de Soréze (Tarn), Toulouse, 1913, p. 18 à 21, le dessin qui accompagne le texte est reproduit dans la fiche de catalogue en annexe de cet article où il pourra être comparé avec notre propre transcription.

Robert FAVREAU, Jean MICHAUD et Bernadette LEPLANT, Corpus des inscriptions de la France Médiévale, T 9 Aveyron, Lot, Tarn, C.N.R.S., Paris, 1984, p. 141, fondent leur analyse sur la publication de F. Lacroix, n'ayant pas retrouvé l'inscription.

(32) R. FAVREAU, J. MICHAUD et B. LEPLANT, Corpus..., ouv. cité, p. 141. Les auteurs se montrent donc réservés vis-à-vis de la traduction proposée par F. Lacroix.

(33) Cf. - Paul DESCAMPS, Etude sur la paléographie des inscriptions lapidaires de la fin de l'époque mérovingienne aux dernières

années du XIIe siècle, dans Bulletin Monumental, 1929, T. 88, p. 5 à 86, XXXV pl.

- Ch. SAMARAN et R. MARICHAL, Catalogue des manuscrits et écriture latine portant des indications de date, de lieu ou de

copiste, T VI, Bourgogne, Centre, Sud-est et Sud-ouest de la France, C.N.R.S., 1968, 2 vol.

- C. BRISAC, Les grandes bibles romanes dans la France du Sud, dans Dossiers de l Archéologie 14, janvier-février 1976, p.

100 à 106.

- Ouvrage collectif sous la direction d'Edmond-René LABANDE, Corpus des inscriptions de la France Médiévale, C.N.R.S., vol. 6 à 9.

(34) La voussure intérieure d'une fenêtre de l'abside est composée de claveaux dont le font est orné de têtes et la partie inférieure est taillée en « rondins » juxtaposés dont la tranche est chargée d'une marguerite, cf. François EYGUN, Saintonge romane, La Pierre­qui-vire, 1979, Zodiaque, coll. La Nuit des Temps no 33, p. 98.

(35) Datant des environs de 1170-1180, cf. Henri PRADALIER, La sculpture monumentale à la cathedral vieja de Salamanque, mémoire sous la direction de M. le professeur M. Durliat, Université de Toulouse-le-Mirail, 1978, pl. XLV et XLVI.

(36) Victor ALLEGRE, L'art roman dans la région albigeoise, réed. Toulouse, 1978, p. 252 et 254.

 (37) Ibidem, p. 253 à 255.

(38) Par exemple, à Burlats, (portail Nord) ou à Saint-Pierre de Monestiés, à Saint-Gauzens (Tarn), pour citer des œuvres échelonnées dans le temps. Ce motif apparaissait déjà en Rouergue, notamment à Conques dans l'abbatiale et à l'enfeu de Bégon (cf. la bibliographie donnée par Jacques BOUSQUET, La sculpture à Conques aux XIe et XIIe siècles, Lille, 1973, note 17, p. 296 à 299), ou encore à Moissac sur le tailloir du chapiteau de Lazare et le mauvais riche.

(39) Nous n'avons sélectionné que quelques fiches du catalogue accompagnées des photographies correspondantes pour figurer en annexe de cet article, en leur conservant leur numéro d'inventaire qui va de 1 à 43.

(40) Dans le cas d'animaux dévorants, ils n'ont été comptés qu'une fois dans la première rubrique à « sujet principal », c'est-à-dire l'animal qui dévore. Dans la deuxième rubrique, le modillon est compté deux fois, une fois pour l'animal qui dévore, une fois pour le sujet dévoré, les deux reliés par un trait.

(41) Il est pourtant probable que l'on ait surtout sauvegardé les pièces les plus remarquables ou les mieux conservées, notamment dans les remplois comme éléments décoratifs, au détriment d'éléments non décorés ou simplement ornés de motifs géométriques qui ont pu être réutilisés dans des maçonneries comme simples matériaux. Nous n'avons en effet retrouvé que deux modillons à motif décoratif et un seul corbeau dépourvu d'ornement.

 (42) C'est un motif d'ailleurs très répandu dans l'Albigeois où on le trouve fréquemment reproduit sur des voussures (Lescure, Burlats, Albi). Cf. Lyne LIMOUSE, Les deux baies romanes de la rue de la Grand Côte à Albi, dans Revue du Tarn, 1975, n° 77, p. 37 et 38 notamment.

(43) C'est souvent le cas, par exemple un modillon à tête de taureau du Musée de Lautrec, ceux des chevets de Burlats et de Lescure (dans ce dernier, les formes sont plus élaborées). Certains corbeaux provenant de Saint-Raphaël près d'Excideuil (Dordogne) et datés d'avant 1130 rappellent fortement des modillons de Soréze, cf. Linda SEIDEL, Romanesque sculpture in American Collections, X- The Fogg Art Museum, II - The Rhone Valley, Provence, Languedoc, dans Gesta, vol. XI/2, 1973, p. 72-73. Les représentations de têtes de capridés de Lescure sont assez proches de celles de Soréze.

(44) Pour les modillons n° 25 et 39, voir les fiches du catalogue en annexe.

(45) Cf. certains modillons du chevet de Saint-Guilhem-le-Désert (Hérault) ; ou d'autres provenant de Saint-Raphaël près d'Excideuil (Dordogne) datés de la première moitié du XIIe siècle, cf Linda SEIDEL, Idem, art. cité, p. 74.

(46) Seul le modillon n° 38 fait l'objet d'une fiche de catalogue en annexe.

(47) Ce n'est guère qu'à partir des hauteurs qu'on pourrait les répartir en deux groupes, l'un de 0,20 à 0,25 d'épaisseur (les plus nombreux), l'autre de 0,27 à 0,30 m ne comprenant que quelques éléments. Or, ces deux catégories ne se retrouvent pas dans les largeurs.

(48) Marcel DURLIAT, Haut-Languedoc roman, ouv. cité, p 308 ; cette remarque relative aux modillons du chevet de Saint-Michel de Lescure résume bien les motifs traités à Soréze.

(49) Les absidioles sont souvent dépourvues de décor. « Cette différence de traitement entre l'abside et les absidioles demeurera le caractère constant des chevets romans de l'Albigeois », selon M. Marcel DURLIAT, Haut-Languedoc roman, ouv. cité, p. 235. (50) Victor ALLEGRE, L'art roman dans la région albigeoise, ouv. cité, p 255.

(51) Ibidem.

(52) Utilisés le plus souvent pour l'abbatiale, ils se rencontrent quelquefois dans les autres bâtiments monastiques. (53) A une ou deux exceptions près.

(54) Traces d'outils laissées très apparentes.

(55) C'est le cas de modillons à têtes humaines ou d'ange, d'animaux dévorant des personnages, etc...

(56) Si l'on accepte de prendre comme éléments de comparaison des modillons comme ceux de Saint-Raphaël près d'Excideuil qui sont datés de la première moitié du XIIe siècle.

(57) L'Albigeois en fournit maints exemples : Burlats, Lescure, etc...

(58) Hypothèse qui aurait le mérite d'expliquer le remploi de sculptures romanes dans le chevet de l'église paroissiale Saint-Martin de Soréze.

(59) L'augmentation de la population pouvait nécessiter et permettre la construction ou la reconstruction de l'église paroissiale

(60) Les bovins, par exemple, représentés de façon assez banale, ne retiennent guère l'attention.

(61) Notamment au chevet de Saint-Michel de Lescure dont les modillons présentent pourtant des similitudes avec ceux de Soréze, au moins dans les sujets traités.

(62) Elisabeth MAGNOU-NORTIER, La société laïque et l Eglise dans la province ecclésiastique de Narbonne de la fin du VIIIe à la fin du Xle siècle, Toulouse, 1974, p. 439-440.

(63) A ce point de vue, les vestiges retrouvés à Soréze se différencient de leur contexte régional si l'on en croit Victor Allègre pour qui « la sculpture romane albigeoise est essentiellement de la taille en méplat », dans l'Art roman dans la région albigeoise, ouv. cité, p. 260.

(64) Cf. fiche de catalogue en annexe où nous évoquons ce rapprochement avec un modillon de l'abside de l'ancienne abbatiale de La Salvetat (commune de Montdragon).

(65) Marcel DURLIAT, Haut-Languedoc roman, ouv. cité, p. 337.

(66) Marcel DURLIAT, Essai de cartographie de l'art médiéval, chapitre VIII de Documents de l'histoire du Languedoc, Toulouse,

1969, p. 139 et carte p. 137.

(67) Marcel DURLIAT, Haut-Languedoc roman, ouv. cité, p. 335.

(68) Ibidem, p. 337.

 

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